Ça y est, en route.

Départ de Haute-Savoie, direction l'Océan Atlantique.

La Traversée
A la lanterne.

A la lanterne.

25 juin

Départ de la maison. Mes affaires sont prêtes. Après un déjeuner habituel dans le cadre habituel, je me prépare, boucle et endosse mon sac à dos, embrasse ma compagne et sors de la maison. 
Tous ces gestes me sont tellement habituels que je ne réalise pas vraiment que ça y est, j'y suis, je vais tenter de traverser la France à pieds.

Je vais jusqu'à Annecy aujourd'hui, une 30aine de km , histoire de m'éloigner le plus possible de tout ce qui m'est familier et me plonger au plus vite dans mon périple. 
En réalité je vais faire un semblant de vrai départ car le soir, ma compagne me récupère pour qu'on aille passer la soirée avec des amis. Autant dire qu'elle ne me ramènera pas en pleine nuit sur le Semnoz (montagne au pied de laquelle se trouve Annecy) pour que j'y dorme. Je dormirai ce soir à la maison et le lendemain matin, nous partirons en famille faire ensemble le début de ma seconde étape, puis, après avoir mangé, ils me laisseront m'élancer vers la suite.
Donc aujourd'hui, c'est préchauffage.
 

Je croise une voisine qui me demande s'il est possible de me suivre. Bon sang, ces derniers jours cette question m'a été posée plusieurs fois déjà. 
Qu'à cela ne tienne, j'écrirai sur mon blog.


26 juin

Passage du lac d'Annecy au lac du Bourget.

Paysages bien jolis !

 

Le matin s'est passé en famille. Dur de les laisser pour continuer seul après le pic nique du midi. Émotions, larmichettes.

 

Ce soir, j'ai trouvé  un bon spot pour planter la tente et la pluie annoncée s'est faite supplanter par le soleil. C'est cool.

 

Les coutures de mes boxers me brûlent le séant que j'ai donc de vaseline enduit céans.

Ça va bien.

 

La Traversée
La Traversée

27 juin

Une 15aine de km me voit tranquillement passer par Arith, et au détour de la montée dans le bois de Prépoulain, je tombe sur un chouette endroit ou passer la nuit.

Discussion avec un éleveur laitier qui fait monter ses vaches dans le champ un peu après.

Un après midi de quasi solitude qui me désarçonne un peu.

Je me suis trempé les pieds a la montée. J'ai enlevé mes chaussettes et marché un peu alentours, pieds nus dans les chaussures.  C'est une connerie, j'ai 2 ampoules qui se forment. 

Conseil en passant : inutile de tenter de faire sécher ses fringues détrempées en marchant avec. On récolte juste des irritations et des ampoules.

La Traversée
La Traversée

28 juin

Levé dans le brouillard. Impossible de faire sécher la tente. Départ dans la brume. Une ombre dans un paysage teinté de mysticisme. 

Traversée de la montagne de Lachat pour arriver à la Feclaz, mon étape suivante. Un joli village station de montagne qui semble s'agrandir au vu des engins de terrassement qui vont en tous sens. Dommage. Je trouve mignon ainsi.

Bon il est seulement 9h30, je vais pousser plus loin.

Je vais finalement doubler mon étape.  Beaucoup de dénivelé sur peu de distance. Une montée souple mais la descente est raide.  Au pied de la croix du nivollet, qui surplombe Chambéry,  je m'engage dans une espèce de gorge avec du gros caillou roulant et de la glaise. Obligé de mettre les mains puis les fesses au sol. J'aime pas les endroits aériens, surtout quand les appuis sont pourris. Je respire. Je me parle. Je me dis que s'il faut je peux faire demi tour (la belle affaire. Quelqu'un a entendu parler du biais d'engagement ? ) Ça me chauffe sous les pieds. Dessus aussi. Sur les côtés.

Bon au final ça fait. J'arrive a Saint Cassin ou la maire m'a autorisé a bivouaquer au pied de l'église.  Avec le cimetière a côté j'ai l'eau courante. Royal !

Je viens de m'apercevoir que l'église est éclairée la nuit et que parfois elle sonne, et que des jeunes s'y retrouvent le soir... je vais être debout tôt demain je crois. 

3 juillet

Je profite d'un matin déjà chaud et beau à faire sécher la tente pour écrire un peu ici. Pas toujours évident car c'est aussi la course entre la batterie de mon tel et moi.

Au matin du 29 juin a St Cassin, lors d'une douche sommaire au robinet du cimetière a 6h du matin,  une grand-mère me salue et se met a papoter. Nous nous quittons puis elle me hèle en sortie de village pour me proposer un café. Je l'aime. Et on papote avec sa famille.

 Après avoir quitté Saint Cassin, je suis arrivé a St Jean de Couz, bien cramé après des km de détours suite à un sentier effondré en bord de falaise. Le point de vue de la pointe ou je fais demi tour se limitera aux nuages.

 

Mon expérience cartes :

Les traits en trait d'union noir : on est pas sûr que le chemin existe encore.

Traits d'union surlignés en rose : le chemin est une rando et il est entretenu.

Trait noir continu : forte probabilité que le chemin existe. Mais pas 100% sûr.

La richesse apparente de la région notamment le bon etat des fermes est un bon indicateur de l'état probable des chemins.

 

Bref.

 

2 enfants me tombent dessus en forêt et m'accompagnent au village vers le lavoir. L'un d'eux appelle ses parents pour voir si je peux dormir dans leur jardin. Au lavoir alors que j'extirpe le reste de la tique a la pointe du couteau (préalablement chauffé) parce que j'ai pas de pince a épiler, un couple arrive et me demande si j'ai besoin d'aide. Je me retrouve a être désinfecté et à leur table le soir même. Wow. Je suis un peu sidéré par cette journée. La sympathie des personnes de ce village, la richesse des fraîches rencontres.

Le lendemain Géo (pour des raisons de discrétion ce prénom sera attribué à mon compagnon de route) m'accompagne sur un bon bout de chemin.

Et nous discutons de tout et de rien dans une agréable insouciance.

Le soir me voit planter ma tente rapidement au bord du lac de saint sixte. L'orage gronde et arrive.  Je me lave rapidement et me rends compte que je suis un peu trop près des arbres a mon goût. La nuit se déroulera bien malgré tout.

Le 2 juillet au soir,

J'ai rejoint des amis a Pommier de Beaurepaire ou nous passons une chouette soirée au bord d'un étang décoré de pêcheurs. Repos physique et moral c'est trop bien. La journée de marche s'est terminée par une traversée de champs en plein cagnard sur 7km, où j'ai doublé  une moissoneuse sur 2km. 

3 juillet

Journée tranquille, jolie halte a Revel Tourdan le midi puis plantage de tente avant l'orage le soir au beau milieu de la fête du village à la Chapelle Surieu. 

En quête d'un endroit pour charger mon téléphone, je me retrouve avec les pompiers de la caserne à côté avec qui nous passons un chouette moment à discuter. 

La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée

4 juillet

Je commence a avoir un bon rythme et j'arrive à gérer les douleurs qui passent de ci de là. Plusieurs étapes que je fais font un peu plus de 30km. C'est assez fluide.

En descendant vers la plaine, un orage grossit au sud. Je rythme un peu plus le pas.

 

La Traversée
La Traversée

Arrivé a La Roche de Condrieu je fais quelques courses car j'ai besoin de 3 jours d'autonomie sur cette partie. Le sac s'alourdit. En contrepartie je me fais un bon repas puis je me lance dans la montée sur les coteaux de vignoble qui surplombent le Rhône.

La Traversée
La Traversée
La Traversée

Finalement a un croisement, je réalise que je n'ai pas vérifié la carte depuis un moment et je me suis égaré. Du jardin de la maison solitaire qui borde le chemin montent des voix. Je vais les voir pour demander mon chemin. 

Je me suis bien raté sur une direction mais le couple m'indique un camping tenu par une amie et m'y accompagne, et me file des tomates "sans aucun traitement, même pas de la bouillie bordelaise".

Me voilà  tout confort pour ce soir.

5 juillet

Je pars vers 7h d'un bon pas.

Il va y avoir de la distance et du dénivelé aujourd'hui,et je pars de plus loin que prévu.

Ce sera le journée a passer des barrages.

Je vois le pilat en dessus.

La Traversée

La journée se passe bien même si le terrain est très cassant physiquement. 

Plus facile de faire un tracé à  la souris sur une carte que de l'emprunter. 

Ça monte puis ça descend, pour remonter encore etc.

Le changement de végétation commence à être marqué.

La Traversée
La Traversée

Je vais assez vite remarquer que beaucoup d'arbres ont des branches qui ont bien défolié et ce pour tous types d'essence. Le sol est jonché de branches. Il me faudra bien quelque heures a me demander ce qui a pu faire un truc pareil avant de songer a de la grêle.

La Traversée

Du barrage en veux tu en voilà. Et tous le long de mon trajet des traces par endroit très marqués par la grêle.

Je vais apprendre ensuite par des locaux que la grêle semble attirée par les lieux où se trouvent les barrages. (Peut etre du fait des masses d'eau ? )

J'ai de la chance de pas être arrivé quelques jours plus tôt.

La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée

Dans une forêt où il semble y avoir -beaucoup- plus de chemins qu'indiqué sur ma carte, je dois bien admettre que je suis en train de me perdre (c'est pas la 1ere fois du parcours). Je ressors la boussole, prend des points de repère pour m'orienter, et c'est reparti. Dire que j'ai emmené cet objet parce que c'est un cadeau et que je pensais que ce serait "rigolo"a "tester"... Ben en fait c'est plus qu'utile, c'est indispensable.

A mesure de mon  avancée, je m'oriente de mieux en mieux avec la carte. J'apprends a contrôler d'où je viens (parce que je peux m'être planté sans m'en rendre compte et être ailleurs que je crois) et où je vais. Au debut je ne contrôlait pas le "d'où je viens" et ça m'a joué des tours. 

Le fameux aphorisme (ouais j'ai appris ce mot hier) : les erreurs sont les marches vers la réussite.

Ou un truc du genre.

 

Finalement je me retrouve de fil en aiguille à dormir le soir près du barrage du pas du riot en contrebas d'un gîte.

Je me trouve pas bien a cet endroit. Sous les pins, a proximité du gîte, sur une espèce de terrasse en pente inconfortable. Toilette sommaire et dodo.

 

6 juillet

Je me lève remballe tout et décolle dans la foulée. Envie de quitter le lieu rapidement. Je déjeune dans un village au dessus dans un cimetière où j'en profite pour faire la lessive de mes affaires.

C'est mon rituel d'ailleurs. Chaque matin je fais la lessive  (tshirt,chaussettes et boxer) et mon sac a dos sert d'étendoir. Le soir tout est propre et sec.

Journée encore très physique. Une copine qui devait me rejoindre m'a appelé pour annuler. Du coup je suis déçu, et je ressens d'autant plus la lassitude physique de mon corps.

Perdu en forêt, fatigué, chemins pas très jolis,je sors ma boussole et commence a m'exciter après les moucherons. Je me mets a faire des gestes désordonnés pour les chasser et essaie de marcher en même temps. Les bâtons dans une main, carte et boussole dans l'autre, je suis vu de loin un randonneur a la démarche saccadée et incohérente. Je trébuche, manque de m'affaler au sol, m'énerve. Y en a un gros qui me tape dans le cou dont j'essaie de me débarrasser jusqu'au moment où je réalise que c'est le galon de serrage de ma casquette que j'ai serré peu avant a cause du vent dont la longueur qui dépasse tapote ma nuque.

Je prends conscience que je suis plus fatigué que ce que je pensais.

Je décide une pause. Prends les cartes et défini les endroits propices pour une tente. Je prends aussi la résolution de ralentir mon rythme pour les 2 jours qui viennent.

Finalement en demandant mon chemin dans une ferme, un retraité hypersportif en train d'acheter ses oeufs me propose le gîte chez lui, 5 mn au dessus.

Fin de journée tout confort.  Douche, lit, repas et débats.

 

 

Barrage de l'Échapre, désaffecté, en travaux de sécurisation
Barrage de l'Échapre, désaffecté, en travaux de sécurisation

Barrage de l'Échapre, désaffecté, en travaux de sécurisation

7 et 8 juillet 

Rythme ralenti, je profite et prends le temps. Je marche moins. J'apprécie.

Campement et pont d'Aurec sur Loire
Campement et pont d'Aurec sur Loire

Campement et pont d'Aurec sur Loire

11 juillet

Pas trop eu le temps pour charger mon téléphone.

J'ai passé Issoire aujourd'hui. Je quitte le parc du livradois Forez pour le parc des Volcans d'Auvergne.

Du coup je vais poster quelques photos de paysages et de ce que j'écris.

Chemin de fer abandonné. Usson en Forez et Arlanc
Chemin de fer abandonné. Usson en Forez et Arlanc
Chemin de fer abandonné. Usson en Forez et Arlanc
Chemin de fer abandonné. Usson en Forez et Arlanc

Chemin de fer abandonné. Usson en Forez et Arlanc

Chemins. Ravinés, improvisés, oubliés.
Chemins. Ravinés, improvisés, oubliés.
Chemins. Ravinés, improvisés, oubliés.

Chemins. Ravinés, improvisés, oubliés.

Poésie. Illusions d'ailleurs.
Poésie. Illusions d'ailleurs.
Poésie. Illusions d'ailleurs.
Poésie. Illusions d'ailleurs.

Poésie. Illusions d'ailleurs.

Écrits.
Écrits.
Écrits.
Écrits.
Écrits.

Écrits.

12 au 17 juillet.

Le 12 a été un tournant physique. Je pensais que j'étais bien et que le cap des douleurs était passé. Que nenni.

vers 5 km de l'arrivée, en haut d'une bonne montée je ressens un bon coup de jus sous le pied gauche et une douleur qui irradie. J'avais remarqué une raideur d'un tendon sous le pied sans m'en inquiéter vraiment. Erreur.

La fin du trajet est assez désagréable. Je me doute que j'ai une tendinite et l'idée qu'elle me cloue mon trajet m'effraie.

Par chance, dans le gîte où je m'arrête dans lequel il n'y avait malheureusement pas de chambre, s'avère finalement avoir une place pour moi. Je tombe au milieu d'une association de randonneur dont les adhérents se trouvent être une magnifique brochette de retraités plus ou moins jeunes. Si vous voyez l'ambiance d'une colonnie de vacances 14-17ans, hé bien c'est pareil à une nuance près : 

Les enfants ont 60-75 ans

Les enfants sont leurs propres Moniteurs

 

Dans cette joyeuse assemblée se trouvent des infirmières dont une me prends en charge et me file crème et anti inflammatoire. Elle me conseille de me reposer les jours suivants.

Mon coach santé en la personne de ma compagne me prodigue les mêmes conseils.

Je quitte le cours d'eau de la Couze
Je quitte le cours d'eau de la Couze

Je quitte le cours d'eau de la Couze

Dolmen. Tumulus qui est une sépulture  collective datant d'autour de -3000/5000 av JC. Lieu marquant également la réticence de mes pieds a continuer dans ces conditions.
Dolmen. Tumulus qui est une sépulture  collective datant d'autour de -3000/5000 av JC. Lieu marquant également la réticence de mes pieds a continuer dans ces conditions.

Dolmen. Tumulus qui est une sépulture collective datant d'autour de -3000/5000 av JC. Lieu marquant également la réticence de mes pieds a continuer dans ces conditions.

Le 13, mes parents et mon oncle qui viennent m'accompagner un bout se chemin passent me prendre au gîte pour réduire l'étape. Mon oncle m'a pris la fameuse crème pour mon pied.

Du coup jusqu'au 16, c'est petites rando avec sac allégé et badigeonnage de voûte plantaire. Mon tendon bien que parfois rétif, semble moins inflammé.

Moments privilégiés en famille a discuter et se promener en prenant le temps. 

Le temps. Le seul vrai trésor.

La Traversée
La Traversée
La Traversée

17 juillet.

Repos. Demain,  le 18, sera pareil et prévision d'achats de semelles et nouvelles chaussures de rando.

La Traversée
La Traversée
L'honnêteté

L'honnêteté

19 juillet.  ..."Mais il est gentil"...


Je marchais sur la route, une sainte journée parmi d'autres, et en approchant d'une maison, j'entends subitement un bruit de cavalcade.
Je tourne la tête et voit accourir vers moi a vive allure un chien qui se met aboyer tout en montrant les dents.  

Je commence a avoir une petite expérience avec les chiens. Suffisante pour rester systématiquement vigilant. Assez significative pour être certain que je ne peux être sûr de rien. Une vieille cicatrice au mollet sait me le rappeler.

J'ai le réflexe de pivoter pour lui faire face et de basculer mes bâtons pour avoir une meilleure prise, puis je me redresse et me met à lui gueuler copieusement dessus a gorge déployée.
Un truc amical du genre :
"MAIS FERME  BIEN TA GUEULE ET CASSE TOI ! FERME TA GUEULE OU JE TE BOTTE LE CUL !"
Le chien s'arrête net au milieu de la route, et se met de profil dans une position préparant une possible retraite. Du coup je rive le clou en m'avançant et en continuant à le pourrir.
Il commence a retourner sur la propriété de son maître, franchit le portail pour longer le grillage en continuant a aboyer.
Je continue ma marche quelques mètres en le surveillant et me rend compte qu'il y a un trou au pied du grillage avec une trace de passage. Ça ne rate pas. Arrivé au niveau du trou il sort et s'avance à nouveau sur moi, mais moins frontalement. Je me remets a lui braire dessus, encore plus assuré par l'ascendant que j'ai l'impression d'avoir pris sur lui. Je me lâche un peu dans un style verbal type "approche encore et je t'écorche" (tellement crédible, moi qui peine à achever un mulot pris dans une guillotine).
Ce petit manège faisant, j'ai dépassé la maison, et tandis que j'invective la bestiole à pleins poumons, une femme sort de la maison, m'aperçoit,  pose le telephone qu'elle avait a l'oreille contre sa poitrine et se met à me crier d'une voix indignée "ARRÊTEZ DE LUI CRIER DESSUS, IL EST GENTIL!"
et moi, entre l'élan de ma peur surmontée et ma colère d'être agressé, de lui répondre : 
"AH OUI ? BEN FAUDRA LUI DIRE, IL A PAS L'AIR AU COURANT."
et elle se barre dans sa maison en ayant l'air d'en avoir rien a faire, ses enfants sortant et s'occupant du chien.

Et quelques mètres plus loin, je réalise qu'à aucun moment, cette personne indignée que j'insulte son chien n'a pensé à le rappeler. Elle n'a pas eu conscience que son chien m'avait agressé et que je réagissais en défense. Pour elle, je crois j'étais sincèrement l'agresseur, et qu'insulter son chien, c'était agresser l'image qu'elle se fait de lui et par glissement agresser l'image qu'elle se fait d'elle même. 

Du coup je me demande jusqu'à quel point un lien affectif peut fausser notre discernement  (je me garderai bien de glisser vers le thème de la gestion des conflits d'intérêts à toute échelle dans nos sociétés humaines...oups c'est fait).


Aux personnes qui m'ont demandé si j'avais pas peur de partir seul je répondais que je craignais surtout :

1-les chiens

2-leurs maîtres 

3-les humains

A ce jour je n'ai pas de modification à faire dans ce top 3.

J'ai pu avoir un aperçu  des réactions canines (excellent jeu de mot) et je prendrai le temps d'en partager prochainement un florilège.

Je vous laisse sur ce teasing de dingue et pour ceux qui ont une vivacité réflexive de basse intensité (oui je teste des éléments de langage, ou ELD comme on dit dans le jargon du marketing politique), réfléchir à où diable se trouve le jeu de mots.

Classes les genouillères blanches.

Classes les genouillères blanches.

Les chiens et moi : Rex

(="retour d'expérience" en language SNCF. "Retex" en langage de l'armée mais ça fait pas de jeu de mots).

 

1 La liberté accordée au chien

Enfermé sur un terrain : chien de garde. vérifier si vraiment enfermé. Maître concerné. Risques faibles.

Terrain ouvert, collier et chaîne : chien de garde. Sécurisé, se tenir loin quand même. Si avec collier électrique sans cloture, vigilance se tenir loin. Maître concerné. Risques faibles.

Terrain ouvert,  en liberté. Méfiance vigilance selon attitude du chien. Maître démissionnaire/il est gentil. Risques moyens.

Errant en liberté. Méfiance. En général passe sa route de façon désintéressée. Maître démissionnaire/il est gentil/inexistant(?). Risques faibles.

 

2 Le chien

Vieux : souvent aboiement démotivé. Fais le job minimum pour garde territoire. Statique. Risques faibles.

Jeune - de 2ans : grande vigueur. Fougue. Inexpérience. curiosité. Méfiance. Peur. Joueur. Difficulté à cerner le comportement. Risques moyens.

Agé proche de 2 ans :  Agressivité et territorial plus probable. Risques moyens.

Agé dès 3 ans : comportement plus franc et intelligible. Expérimenté. Moins fougueux. Risques moyens.

Attitudes : Les oreilles semblent un bon indicateur.

En avant : dispo, curieux, attentif. Risque faible.

En arrière/côtés discernement plus difficile. Arrière serait plutôt soumission, côté serait agressivité méfiance  (?). Risques faibles à élevés.

Les babines retroussées : rigole a une bonne blague. Je déconne, agressivité rapport de force pour impressionner dissuader, préparation attaque probable. Risques élevés.

En groupe : si reste a distance + aboiements, rester loin, statut quo. Risque faible.

Si vient directement au contact, attitude agressive aboiements + babines retroussées + partent chacun d'un côté pour contournement : agressivité et attaque très  probable. Là il faut clairement prendre une posture de défense et se préparer à  une attaque. Trouver une position qui limite la prise a revers. Parler hyper fort posément pour alerter un eventuel maître, évacuer le stress, et signifier une capacité de défense à la meute (de défense,  pas d'attaque). Risques très élevés.

 

Voilà en gros. Ce n'est en rien une vérité. Juste une perception personnelle. Il me faudrait creuser le sujet.

Il ressort globalement que le risque d'être attaqué par un chien reste faible. Bien sûr la fréquence d'exposition augmente la probabilité du risque.

 

Mon évolution sur le sujet :

Mieux je comprends, plus je suis préparé, moins je me sens démuni, plus je suis dans la capacité d'action, moins j'ai peur.

 

information + expérimentation => compréhension => savoir faire.

 

Cet aparté "30 millions d'amis - ou presque" étant fini, me voilà cette fin de journée dans la clairière parfaite. Ça grouille de vie. Grenouilles, libellules,  poissons, fourmis...  plus de 3h à regarder ce petit monde sans voir le temps passer. Féerique.

Pensée pour le message envoyé récemment par un ami :

"(°)...bonne chance, que le chemin soit doux sous tes pas et qu'il te porte vers la beauté".
La beauté.
La beauté.
La beauté.
La beauté.
La beauté.

La beauté.

20 au 22 juillet

"Mais tu passes à Perols ? Y a mes parents là-bas, tu pourrais y faire une pause !"

VetoBio (prénom d'emprunt) avec qui j'ai passé du temps a Pommier de Beaurepaire (le couple d'amis, suivez un peu bordel), a prévenu ses parents. 

J'y ai passé 2 nuits et 2 jours de repos, de simplicité, de sérénité à papoter d'un peu tout.

Demain ma compagne me rejoint pour quelques jours a marcher ensemble . Je suis joie !

La Traversée
La Traversée
La Traversée

Aparté "topo traversée"

J'en suis aux 3/5 èmes de mon parcours environ.

4 semaines écoulées sur 7.

Le dénivelé sera désormais très faible.

Présenté ainsi ça paraît jouable.

Bémol :

Cela nécessite de grosses étapes que mes tendinites sous mes pieds, bien que très adoucies grâce au repos pris ne me permettront a priori pas.

 

Donc ptet que je serai amené à continuer a prendre le temps, quitte a faire du stop a des endroits qui me paraîtront inintéressants.

Donc à ne pouvoir faire la totalité à pieds.

On verra.

23 au 27 juillet

Ma compagne descend du train, ce sont les retrouvailles. La joie d'être là ensemble est immense. 

A tel point que j'en oublie mes bâtons à la gare. Ça va, on a juste fait quelques centaines de mètres.

Ça fait plaisir de voir une gare de voyageurs fonctionnelle et des gens descendre d'un train au lieu d'un "Bus TER". L'état du réseau Ferroviaire Français est très mauvais et au vu de l'enveloppe donnée par l'état a la SNCF pour cette année, a ce rythme d'ici 5 a 7 ans, il restera juste les lignes TGV.

Un très bon vulgarisateur ici :

https://nitter.42l.fr/BB27000

A quoi servent les fusibles ? Rdv sur le lien précédent.
A quoi servent les fusibles ? Rdv sur le lien précédent.
A quoi servent les fusibles ? Rdv sur le lien précédent.

A quoi servent les fusibles ? Rdv sur le lien précédent.

Quelques dessins en attendant à la gare.
Quelques dessins en attendant à la gare.
Quelques dessins en attendant à la gare.

Quelques dessins en attendant à la gare.

Bon c'est pas tout ça mais on est là pour marcher. Ma compagne et moi étant des Mules (aucun rapport avec la marche ultra legere -MUL-), nous partons dans la foulée (forcément).

Le soir nous nous posons en bivouac auprès d'un lac assez fréquenté  (pour la Corrèze), et nous nous retrouvons dans une discussion passionante avec un chasseur au détour d'un chemin (oui oui. Je crois qu'il n'était pas représentatif du milieu, j'espère  que la réalité me donne tort).

La Traversée
La Traversée
La Traversée

Nous avons fait une 20 aines de km le 1er jour, et ma compagne a le dos qui tire un peu à porter le sac. Normal.

On a fait un peu le point et j'en profite pour partager l'expérience que je me suis faite sur l'équilibrage d'un sac à dos :

-Le matériel le plus lourd et dense au  niveau des lombaires, juste au dessus du bassin. 

-Le poids réparti équitablement sur les côtés.

La bouteille d'eau de 1.5l est l'élément que j'ai galéré le plus a centrer correctement. Le moindre décalage et vous sentez rapidement l'endroit de votre dos qui compense.

 

Bref, il faut aussi dire que ma dulcinée n'a pas pesé son sac. Elle l'a mis 1 fois sur son dos et s'est dit que c'était bon...

Et je me suis aperçu le soir qu'elle trimballait des légumes. Genre 2 concombres et 2 courgettes de catégorie familiale. Donc forcément ça tire.

De mon côté ça va côté physique même si c'est pas idéal.

Le 2nd jour on doit approcher 30km. Bivouac le soir dans un champ à côté d'un petit cours d'eau. Pour se laver et faire la vaiselle, la présence d'un petit nant à proximité, c'est de loin un grand oui. Les vaches présentes sur le champ nous laisseront le temps de remballer le lendemain avant de venir nous voir.

Discussions sur le temps et sa consistance. Le fait qu'il passe vite quand on marche et que l'on arrive pourtant à en profiter, et a le savourer.

On mange des mûres tous les 3km. Elles sont excellentes.

On découvre quelques "détails" de l'histoire de France.

C'est un levé de soleil en fait, on a complètement triché.
C'est un levé de soleil en fait, on a complètement triché.

C'est un levé de soleil en fait, on a complètement triché.

Aaah, ce cher Marechal que certains politiques s'évertuent à ériger en "grand homme". (Non. Les faits sont implaquables.)

Aaah, ce cher Marechal que certains politiques s'évertuent à ériger en "grand homme". (Non. Les faits sont implaquables.)

Les jours qui ont suivi, j'ai économisé la batterie donc j'ai écrit au dos de mes cartes. La suite sera donc manuscrite. C'est moins rédigé et peut être écrit à la volée.

Vous allez lire un état d'esprit moins amène sur cette période où la solitude revient, et sous le constat amer que je fais de l'état général de la faune et la flore sur les km traversés, qui me donne la sensation que notre environnement se meurt, l'impression de traverser un désert en devenir.

Vous allez peut être bien rire aussi.

 

La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
Big Brother is vaching you.

Big Brother is vaching you.

Zone où j'ai vu un chevreuil
Zone où j'ai vu un chevreuil
Zone où j'ai vu un chevreuil

Zone où j'ai vu un chevreuil

31 juillet.

Départ au petit matin du camping et j'évite soigneusement de couper dans les bois. Par ici les noisetiers semblent souffrir plus qu'avant. Je réalise aussi qu'il n'y a eu aucune pluie signifiante depuis maintenant 4 bonnes semaines.

Une voiture s'arrête brutalement. Sur le bas côté devant moi. La conductrice m'interpelle quand je passe au niveau de sa fenêtre.

Elle me détaille cliniquement de la tête au pied puis me jette :

"Je vais à -bled qui m'évoque rien- je peux te rapprocher".

"Je vais pas par là bas merci. Je marche juste".

Elle me scanne à nouveau rapidement.

"Bah marche bien alors".

Elle repart comme elle s'est arrêtée. 

Lunaire.

 

J'écoute un podcast recommandé par ma compagne. 1 euro la minute. Je découvre à mesure en m'étouffant de rire. En abordant un bois alors que je me bidonne à écouter une scène de téléphone rose aux bruitages forts équivoques, je tourne la tête et découvre avec surprise un groupe de scouts se reposant me regarder avec stupeur. 

Je sens que le rouge va me monter aux oreilles et je désamorce en lançant un "bonjour et bon après midi " au milieu du capharnaüm coïtal émis par mon téléphone, sous leurs yeux médusés.

Il me faut bien 5mn pour me remettre d'un mélange de gêne et d'amusement offert par ce fabuleux hasard de la vie.

Je me mets à rire nerveusement, puis gagné par un fou rire les larmes m'embuent les yeux. 

Je suis là, à me bidonner, marchant à l'aveugle, sortant de l'orée du bois baignant  de chaleur et j'entends que je dévie du chemin caillouteux chauffé a blanc au son du craquement des branches mortes...

"Shrak, craque, cric, scroutch"...

...Puis un

"SSSSsssZzzzzzziiiiiissss"

WowoWowWOWOWOWPETARD !

 

Ascenseur émotionnel et reset (remise a 0, en francophonie).

Reboot cognitif. (Relance du système). 

Je marche.

J'arrive au stade abandonné de Coulgens. Nom de village adapté puisque qu'un Coolcouple me donne de l'eau et m'invite à boire un coolcoup autour d'une coolversation. Sympa.

Je plante ma tente au stade, puis mange en écrivant mes âneries pour sustenter les lecteurs assoiffés des dernières nouvelles de mon épopée Homérique. 

Ou chimérique.

Tout dépend.

 

En attendant les mégalacs
En attendant les mégalacs

En attendant les mégalacs

Une ombre au tableau/Moulins/Demerden Sie sich.
Une ombre au tableau/Moulins/Demerden Sie sich.
Une ombre au tableau/Moulins/Demerden Sie sich.

Une ombre au tableau/Moulins/Demerden Sie sich.

Et la marmotte mit le chocolat dans le papier d'alu, en expliquant qu'elle N'EST.PAS.UNE.MARMOTTE.MERCI.

Et la marmotte mit le chocolat dans le papier d'alu, en expliquant qu'elle N'EST.PAS.UNE.MARMOTTE.MERCI.

1er aout

Les pieds tiraillent toujours, aussi j'ai décidé de faire un détour pour me poser en camping. J'arrive à Mansle vers midi, luné comme un chien (ce qui ne veut rien dire, et pourtant vous avez compris ou je veux en venir). Je fais des courses et me pose dans le camping "municipal" à gestion privée.

Je trouve l'accueil fort désagréable, puisque les mâles ne daignent pas me dire bonjour et me bazardent à l'employée déjà débordée sans bien sûr lui avoir expliqué quoi faire au préalable. Ça en jette au niveau du style, c'est viril, ça a le verbe haut, mais ça sert a rien d'autre.

Au prix forfaitaire demandé pour 2 nuits, je regrette de pas être carrément venu en camping car avec un max d'équipements électriques énergivores, histoire d'amortir l'investissement. Jaccuzzi, grille pain, climatisation, frigo... on s'rait pas bien là ?

J'hésite a dire bien fort à la dame (pour que les 2 lourdaux entendent) que nous nous sommes mal compris :

Je ne veux pas investir et prendre des parts dans le camping, mais juste y passer 2 nuits avec 1 tente.

 

Pas grave, je prendrai des douches chaudes de 8h. Encore que vu le style, l'eau est sûrement tiedasse.

 

Bingo.

 

Sinon je peux me doucher sous l'arrosage automatique de l'hippodrome à côté entre 8h et 12h.

Nous sommes vraiment un tas de crétins.

C'est probablement en cet endroit qu'il jouait du piano debout.
C'est probablement en cet endroit qu'il jouait du piano debout.

C'est probablement en cet endroit qu'il jouait du piano debout.

2 août 

Repos. Dur a décider mais agréable à profiter. 

La veille au soir j'ai été malade. Probablement après avoir mangé  une boite de sardine qui n'a pas aimé son séjour prolongé dans mon sac. Si le chaloupé de ma démarche lui a rappelé l'océan, la chaleur qui règne dans mon sac a dos doit approcher celle de la mer méditerranée cet été , soit trop chaud pour y survivre. 

Après avoir restitué indirectement à la mer les sardines ingérées (=vomi tripes et boyaux dans les lieux d'aisance), je me suis endormi comme une masse. 

Non pas qu'une masse puisse dormir mais pour exprimer l'idée d'inertie totale dans mon sommeil.

L'inertie étant une force des plus puissantes, je n'ai pas entendu cette nuit :

. Le brouhaha de la nationale à 4 voies, hyper fréquentée.

. Le voleur appréhendé cette nuit vers 3h.

. Les gamins hystériques d'à côté réveillés par le bruit, faire la java de 3 a 4h du mat.

. Les policiers faire une ronde ce matin.

 

J'ai appris ça de mes supers voisins de camping avec qui je mange ce soir et qui, eux, ont l'air d'avoir assez mal dormi.

Je pense leur proposer des sardines.

3 août 

C'est reparti après une mauvaise nuit. Le meuglement plaintif et continu de la 4 voies a été difficile à ignorer.

Je vais tenter du stop pour aller a Aigre, ça me fera récupérer le détournement vers Mansle plus un bonus de 10km. Au bout de 4 bornes une voiture s'arrête. Le chauffeur est architecte. Il me dépose au supermarché du coin et je me ravitaille pour 3 jours. 

Selon comment vont réagir mes pieds je ferai 2 ou 3 étapes. 

Il fait chaud, je me farcis beaucoup de route. Du champ. Des grandes cultures. Ruisseaux souvent secs. J'essaie de pousser le plus loin ce matin, car a mi parcours je serai en forêt, ça temporisera la chaleur de l'après midi. Vers 13h je suis en foret et me pose pour manger.

Je repars et je tombe 30mn après sur une tablée d'anciens qui me hèlent. Ils m'offrent de l'eau puis un thé. Ils ont passé la matinée à déblayer les balisages du sentier de rando local. On discute un moment et je repars. Tranquille à l'ombre de la forêt, a bouffer de la toile d'araignée.

J'arrive au cimetière de Saleignes vers 16h30 et je ne suis pas seul. Une personne avec un sac a dos semble venir comme moi y chercher de l'eau. C'est une jeune femme. On discute un peu. Elle fait Niort-Perigueux sur le GR36. Spartiate pour dormir : une bâche et un duvet. Je suis super content de voir une collègue. Elle est un peu a l'arrache, me dit qu'elle est preneuse de conseils. Comme on pourrait y passer une journée, je lui donne quelques grandes lignes sur l'hydratation. Et là voilà qui s'en va, et moi je pose ma tente, ravi de cette rencontre et de m'être senti utile.

Après avoir mangé, je me lave a l'arrosoir du cimetière. Un peu de distraction pour les locataires du lieu peut être.

La Traversée
La Traversée

4 août 

Aujourd'hui c'est 28km environ. Je suis levé a 6h et j'aimerais boucler le plus vite possible pour éviter la chaleur, même si mon tracé optimise les chemins ombragés.

C'est fluide. J'avance bien, et ponctue ma marche d'autant de pauses que nécessaire.

J'ai gratté 1km en coupant dans un bois peu dense et je suis content jusqu'au au second bois où je réalise que ça colle pas avec ce que j'avais sur le plan. Il était censé y avoir des chemins horizontaux et des chemins de traverse, mais les 2nd n'existent plus et la forêt est dense. Soit je  contourne et je me rajoute bien 4km soit je tente la chance en espérant qu'un chemin soit resté empruntable. 

Parmis les chemins traversants en pointillés sur la carte,  il y en a un qui fait une transversale. Je me dis qu'il est possible que celui ci existe toujours, car les autres sont tous parallèles et étaient peut être des chemins de coupe.

Je sors la boussole, garde la carte à la main. C'est parti. 

C'est long j'arrive au point où je vais devoir décider si je contourne carrement la forêt. Enfin je pense, car sans point de repère je n'ai que mon évaluation de la distance.

Un chemin se présente, à peu près pratiquable, je me lance. Je débouche sur un des chemins horizontal. YES. Plus qu'un et je serai sur la diagonale. Si elle existe.

Finalement je trouve un chemin qui est plus une coupe de propreté. Il a l'air oblique par rapport a ma direction. Il descend et remonte. Je compare aux courbes de niveaux. Ça semble plutôt pas mal

Selon la boussole et mes estimations je devrais tomber à 50 mètres de cette diagonale que je cherche. Si elle existe encore. Et bingo !

Tout s'enchaîne nickel et me voilà sorti du bois ! Trop fier. Beaucoup de chance sur l'existence des chemins, et un vrai bon repérage sur carte et boussole.

J'ai pas vu le temps passer.

 

1h30 plus tard je suis à Le Vert, où se trouve un petit camping municipal intimiste et super joli. Je suis ravi. Je prends un bouquin dans l'armoire a livre et me baque les pieds dans l'eau le reste de l'après midi. Le soir un couple de cycliste m'invite a partager leur repas.

La Traversée
La Traversée

5 août 

Il devrait faire moins chaud.  Tant mieux parce qu'aujourd'hui c'est beaucoup, beaucoup de plein champs. Et bien 37km. Je pourrais cinder en 2 étapes mais le lieu fait pas du tout envie. Sauf si physiquement je le sens pas.

 

Info temporaire

Je suis arrivé le 11 août a St Hilaire de Riez et je profite depuis de vacances en famille.

Je mettrai en mots ici la fin de mon parcours courant septembre. J'ai encore vécu quelques anecdotes rigolotes, et surtout, je l'ai fait : j'ai traversé la France a pied. Ça paraît presque absurde, presque facile, presque irréel.

Ça a été une magnifique expérience.

Je vous souhaite à tous de vous autoriser à envisager quelque chose qui vous tient à coeur et qui se trouve hors de portée des limites que vos croyances ont posées.

5 août, suite.
Départ aux aurores le matin pour éviter la chaleur. 
Je vais être à l'ombre d'une forêt les 5 premiers km, mais ensuite ça va être plutôt exposé. D'ailleurs le reste de mon trajet va être de plus en plus exposé, ce qui va rendre la fin plus difficile je pense, sans parler de cette hâte qui nous gagne généralement quand nous arrivons au bout de quelque chose. L'impatience et la chaleur vont devenir mes contraintes principales à mesure que je me rapproche de la fin de cette traversée.
Je longe donc la forêt domaniale de Chizé, forêt qui a été grillagée et se trouve désormais interdite à toute personne non autorisée. Le site a été verrouillé par le CNRS qui y étudie l'évolution de la faune et la flore quand l'humain la laisse tranquille. Quelle drôle d'idée. (Bon, ça ne la préserve pas pour autant de la totalité de l'influence humaine mais ça limite notre capacité de nuisance sur le milieu, c'est déjà ça).
C'est joli. Je suis un petit sentier boccagé le long de la clôture, et je vois des bestioles, ce qui n'a pas franchement été courant depuis que je suis parti ( soit environ 900 km dont l'essentiel dans des parcs naturels régionaux), donc je suis content.  
 

Pour les Bretons, reste à trouver le Loup et le Renard.

Pour les Bretons, reste à trouver le Loup et le Renard.

Sorti de la forêt, je suis désormais sur une petite route au milieu des champs. Le ciel est voilé, une bonne chose.
Je traverse des champs, des bourgades, des rivières à sec. Par ci par là je vois les système d'arrosage dans des champs de maïs.
Le soleil finit par percer. L'atmosphère chauffe rapidement.
Le hameau où j'avais prévu de demander de l'eau est désert. J'appréhende les prochains km car mes gourdes sont quasi vides.
Au détour d'une forêt dans un marais, je croise 2 personnes qui semblent galérer à réparer une gigantesque pelle mécanique. Ils me donnent 1 litre d'eau. Ils viennent d'abattre les arbres environnants (du peuplier ?). Une coupe rase. Ils ont replanté la même variété dans la foulée. Je leur demande s'ils adaptent les essences en prenant en compte le changement climatique et l'un me répond "qu'ici c'est du marais, ça craint rien". Je regarde autour de moi et lui fait remarquer que le sol est particulièrement sec pour un marais. "Oui mais c'est exceptionnel" me répond-il. Je lui réponds que l'exception va devient la norme, sans m'étendre plus. 
Je sors du marais et déboule sur un champ. 
 

La Traversée

Les environs sont un désert. Un vent chaud balaie les champs. Alors que je drape ma tête dans mon voile, quelque chose en mouvement attire mon attention dans le champ.
Un tourbillon se dessine à une 30 aine de mètres, puis forme soudainement une colonne. La vache. Une petite tornade. 
J'en vois une autre qui démarre un peu plus loin.
Je sors mon téléphone pour en filmer quelques unes et je reste un bon moment à regarder le balai de petits tourbillons qui se forment, grandissent et meurent en traversant le champ.

La Traversée
La Traversée

Je marche une dizaine de km dans ce paysage semi désertique parcouru par ces mini tornades. 
Entre flippant et magique.

Bon, il fait chaud, ça tire sous les pieds et je fatigue. J'atteins enfin un petit bois et me trouve un endroit à l'ombre pour faire une sieste. Encore 6km et je pourrais acheter à manger et me poser dans un camping.

La sieste fait du bien. Je repars et bordel ce que j'ai chaud. Soudain, sur le chemin gagné par l'herbe où je me trouve, des sauterelles se mettent à sauter dans tous les sens sur mon passage. 30 mètres à sourire.

J'arrive enfin au camping. Rituel choix de l'emplacement et de l'endroit ou poser la tente.

6 août
Aujourd'hui, je longe le canal du mignon quasiment toute la journée. Normalement il y a des arbres, normalement je serai sur la bonne rive (celle où je serai l'ombre). 32 à 33 km. 
Le début du canal est très bas, à sec par endroits, laissant à la vue les terriers des ragondins, probablement immergés d'habitude.
Dire que j'avais imaginé faire du canoë si l'opportunité se présentait...
 

C'est -le- mignon
C'est -le- mignon
C'est -le- mignon
C'est -le- mignon

C'est -le- mignon

L'émerveillement de voir plein de ragondins barboter se tari doucement et fait place à une marche d'une monotonie agréable. Je suis assez fasciné par la capacité que nous avons eu, en tant qu'humain, à modeler des paysages entiers pour en exploiter de quoi mieux vivre. J'imagine la réflexion et le temps qu'il a fallu pour imaginer, ce système de marais, l'évaluer, le mesurer, le construire, le tester, le modifier. 
L'accès facile à des ressources abondantes et notre capacité à utiliser ces ressources pour construire des machines, elles mêmes ayant la capacité de transformer des matières premières pour démultiplier notre capacité d'action ( une pelleteuse par exemple, est l'augmentation de notre capacité à creuser à la main via la consommation de ressources pour sa construction et son fonctionnement), semble nous avoir réduit à concevoir pour le court terme nos infrastructures, à la fois parce que notre capacité de transformation permet d'agir de façon courte avec une ampleur énorme (Si vous faites un trou pour planter un arbre à la main où à la pelleteuse, vous vous apercevrez rapidement la différence), mais également parce que la sophistication des machines outils me paraît proportionnelle à leur rapidité d'usure, donc à la nécessité d'entretien, donc à la nécessité de disposer de ressources abondantes pour cet entretien. 
L'accès facile à des ressources en abondance paraît être, en conséquence, un accélérateur qui démultiplie capacité de transformation, vitesse de transformation, dépendance aux ressources, et ce à tous niveaux (Agriculture, éducation, construction, sciences, santé, mobilité, politique, forces armées,...)
 

D'aucun lisant ces lignes se dira que mes réflexions nous éloignent un peu du sujet initial donc pour revenir à l'histoire des marais poitevins : 
https://fr.wikipedia.org/wiki/Marais_poitevin

 

En quittant finalement le canal, je me retrouve face à un panneau qui me fige sur place.

Cette phrase installe un suspens de dingue quand même.
Cette phrase casse bien l'effet de suspens.
Cette phrase ne sert à rien.
 

Bref je suis donc figé sur place par un panneau. Et pas un panneau clone bleu d'autosatisfecit de la région Auvergne Rhone Alpes sur sa gestion prétendument exemplaire et payé par mes impôts, non. (Oui je sais vous vous impatientez là, ça devient probablement agaçant ces tergiversations). 

Figé devant un panneau donc. Un bête panneau blanc et rouge sur lequel est écrit "Bienvenue en Vendée".
Je me surprend à sourire bêtement. Je suis arrivé en Vendée. Punaise.
De joie je sors mon téléphone pour prendre le panneau en photo, attends 10minutes que la route hyper fréquentée soit vide pour que ce soit joli et "clic".
Ce moment, cette photo toute bête me procure une immense satisfaction. 
Allez donc savoir pourquoi...

Je vais me poser d'office à la guinguette du coin pour fêter ça d'une bière en sachant que je vais le payer cher :
1- Avec la chaleur et l'alcool je vais avoir du mal à redécoller

2- Me savoir arrivé en Vendée augmente mon sentiment d'être arrivé, donc mon impatience, donc le risque de merder quelque part. Il me reste encore bine une semaine à marcher.


Je bois un verre, repars, me rend compte que je dois recharger de l'eau pour bivouaquer le soir, m'arrête au hasard et tombe sur une famille de paysans super sympas qui m'invite à boire et à papoter. Je repars porté par le plaisir d'avoir passé un bon moment et avec des indications sur un lieu ou poser ma tente : la digue séparant le marais sec du marais humide.
Je croise un ancien sur le chemin qui me propose un verre, mais je décline car je vois le soleil bas sur l'horizon. Nous discutons un peu puis je repars.
La digue est en fait un chemin bien chaotique ou je peine à trouver un endroit plat. Le soleil qui décline et mes voutes plantaires me poussent à installer ma tente sans faire trop la fine bouche. De toute façon, avec l'habitude, et surement la fatigue, je dors très bien un peu n'importe où tant que la température ne me fait pas transpirer.

La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée

7 août

Je quitte la digue pour de la route. Traversée de petits villages. Fracture de la cornée à la lecture d'un panneau affiché à l'entrée d'un village "Marché reporter au...". Oui oui, je fais un peu mon précieux de l'orthographe, mais quand même, un panneau publique en entrée de village, faut pas déconné.
Petite étape aujourd'hui. Je m'arrête à un camping, aux propriétaires sympas, mais où poser une tente pour la nuit me coûte plus de 21 euros. Après avoir hypothéqué un rein pour payer, je me balade alentours, écris et dessine. A une 20aines de mn près, je manque de me prendre une branche sur le coin du nez.

La Traversée
La Traversée
La Traversée

8 août
Je pars de nouveau à l'aurore. Le paysage et la lumière sont dingues. Je vois des bestioles autre qu'humaines. Je suis content.

Il suffira d'un cygne disait le poète.
Il suffira d'un cygne disait le poète.

Il suffira d'un cygne disait le poète.

Le jour se lève et marcher en suivant la ligne droite d'un canal aux berges nues devient ennuyeux. Quelques hérons s'envolent de ci de là à mon passage. Les poteaux électriques semblent s'avachir doucement vers le sol (Ou alors Francis et Jean-Eudes avaient fait le casse croûte arrosé avant de poser les poteaux, ou ils avaient pour tout matériel un escabeau trop court, je ne sais pas).

La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée

Mon ennui disparaît aux abords de Luçon, une ville d'une taille que je n'ai plus vu depuis un sacré moment. C'est à peu près là que je dois passer le cap des 1000 km parcourus. 
Luçon c'est mignon. J'y trouve le signe de toute mégalopole développée qui se respecte en la devanture d'un Kebab, où je décide de m'arrêter manger.
Je m'aperçois que j'ai une alimentation très carnée durant ce périple dont la base se constitue de pain, fromage et jambon. Les légumes et fruits m'attirent surtout sur les lieux où je fais mes courses car le ratio poids/calorie est moins efficace. Je me demande si le nomadisme implique intrinsèquement un régime plus carné sans pousser la réflexion plus avant.
Je me balade un peu puis pousse jusqu'au lieu que j'ai repéré sur la carte pour camper, le long d'une rivière.

La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée
La Traversée

9 août

Je dois rejoindre aujourd'hui un ami rencontré dans une vie précédente. Nous n'étions pas certains que ça se goupille, et nous allons finalement marcher mes 2 derniers jours ensemble. Du moins moi car lui est à vélo. Je me réjouis de revoir Manneken (faut il préciser que c'est un prénom d'emprunt), que je n'ai pas vu depuis 8 ans. C'est un chouette contexte pour papoter d'un peu tout en long et en large, et ça va être particulièrement bénéfique pour contrer ma lassitude qui s'installe et la fatigue physique qui vient avec. Je sens que mon corps en a marre, et que l'esprit y est moins. Le paysage constitué pour beaucoup de champs interminables quoique joli par endroits n'aide pas beaucoup non plus. Le lac du Graon, que je longe, est bien bas. Les retenues d'eau et quelques étangs qui parsèment mon chemin, souvent au milieu des maïs, font également triste figure.
Alors que je discute avec un habitant pour savoir si, à l'endroit où j'ai prévu le bivouac, le ruisseau coule encore, je vois Manneken arriver à vélo.
Ce soir, c'est bivouac en plein champ, les ruisseaux sont secs. Manneken a cependant pris de quoi faire un apéro sympa pour le soir. 
En début de nuit je suis réveillé par une lumière, avec l'impression d'un phare braqué sur moi. J'ai laissé l'entrée de ma tente ouverte à cause de la chaleur, et la lune se trouve en plein dans l'axe de l'entrée. 

La Traversée
La Traversée
La Traversée

10 août

Quel plaisir de partager ma route avec Manneken. Le temps passe rapidement à discuter sur des sujets divers et variés. J'ai décidé de prendre un peu plus la route pour gagner 4km sur les 2 dernières étapes. Besoin de m'épargner un peu les pieds et de réduire au maximum la dernière étape qui est longue. D'autant qu'il fait toujours très chaud. 
Nous nous dégotons un super endroit pour pique niquer le midi au bord d'un ruisseau qui coule encore un peu. Sieste. L'après midi s'écoule dans l'indolence provoquée par la chaleur. Le camping prévu n'accueille pas les campeurs (oui ça paraît idiot), il s'avère être plutôt un village de bungalows. Nous poussons au village d'à côté qui a un champ attenant au cimetière. Bivouac avec eau courante.
Encore réveillé par la pleine lune, braquée sur l'entrée de ma tente.

 

11 août
C'est le dernier jour. Je sens la fatigue et que mes genoux sont tiraillés depuis un moment. Je tolère moins bien le poids du sac, qui se vide pourtant de son stock de nourriture. Il est temps que ça finisse. 1100 km en 47 jours, ça tire. D'autant que mes étapes ont été longues. Il aurait été dans l'idéal plus adéquat que je fasse des étapes plus courtes et me reposer plus régulièrement, mais je devais en conséquence avoir plus d'autonomie en nourriture, donc plus de poids dans le sac. Rien n'est parfait, tout se résume à arbitrer selon un contexte et un instant donné. J'avais également envisagé que la pluie me contraigne à me reposer régulièrement, voir m'immobilise. Finalement en dehors de la première semaine a été parsemée d'orages, la météo s'est pour le reste résumée à un soleil et une chaleur quasiment immuables. 
Il est fort probable qu'un autre contexte météo m'aurait posé d'autres difficultés sur certains aspects, voir m'aurait pousser à arrêter.

La journée s'écoule, agréable et tranquille en compagnie de Manneken. Après un pique nique ombragé et une sieste, nous arrivons en vue de Saint Gilles Croix de Vie. Nous nous quittons là, je regarde Manneken disparaître sur son vélo et me tourne vers la fin.

Arriver dans une ville touristique en bord de mer me fait me sentir comme un extra terrestre. De fait, je suis une vision incongrue dans cet univers. Un gouffre se tient entre ma disposition d'esprit et celle des personnes que je croise. Je me sens étranger à leur vie et à leurs aspirations estivales. Normal, mais particulier à vivre.
Je n'aurais pas de comité d'accueil qui a été dissuadé par la chaleur. C'est probablement une bonne chose. Sans trop savoir pourquoi, je suis content de terminer seul.

Finalement je bute sur un truc que les locaux appelle "Océan Atlantique". Il semble que je ne puisse pas pousser plus loin. Je suis arrivé.

 

 

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